Conférence - Egas Bender de Moniz Bandeira : Assimilation ou intégration ? La représentation de la Mongolie, du Tibet et du Xinjiang dans les parlements de l'Empire Qing et de la République de Chine
Anne ChengCollège de FranceHistoire intellectuelle de la ChineAnnée 2024-2025Conférence - Egas Bender de Moniz Bandeira : Assimilation ou intégration ? La représentation de la Mongolie, du Tibet et du Xinjiang dans les parlements de l'Empire Qing et de la République de ChineEgas Bender de Moniz BandeiraAssistant professeur à l'université d'Erlangen-Nürnberg, chercheur associé de l'Institut Max Planck de l'Histoire et Théorie du DroitRésuméDans cette présentation, j'examinerai la représentation de la Mongolie, du Tibet et du Xinjiang dans les parlements de la Chine du début du XXe siècle, notamment au sein du Conseil consultatif politique (Zizhengyuan 資政院) de la fin des Qing et de l'Assemblée nationale du début de la République. J'identifie deux modes distincts, mais entremêlés, de représentation des régions frontalières : un modèle patrimonial, qui maintenait les privilèges aristocratiques en échange de la loyauté, et un modèle d'État-nation, qui envisageait un statut égal pour les régions frontalières aux côtés des provinces à majorité Han. En reconstruisant ces deux modes de représentation parlementaire, cette intervention replacera les débats constitutionnels chinois dans un contexte eurasien plus large, montrant comment les tendances mondiales en matière de gouvernance ont croisé les efforts de la Chine pour assimiler ses populations frontalières diverses dans un État-nation unitaire.Depuis la formation de l'Empire Daicing (Qing) aux XVIIe et XVIIIe siècles, ces régions étaient administrées selon des arrangements distincts des provinces. La Mongolie et le Tibet restaient sous la juridiction du ministère des Affaires des régions extérieures (Lifan yuan 理藩院). Le Xinjiang fut officiellement érigé en province en 1884, mais continua d'être traité sous de nombreux aspects comme un territoire frontalier. Lorsque le gouvernement Qing annonça sa « réforme de gouvernance » dans les années 1900, le statut des confins joua un rôle central dans les débats sur l'adoption d'une constitution impériale. J'expose comment le parlement fut conçu comme un instrument d'unification nationale plutôt que comme un moyen de représenter la diversité impériale. Par ailleurs, les intellectuels et fonctionnaires chinois, conscients de la concurrence des institutions parlementaires émergentes en Russie et dans l'Empire ottoman, craignaient que des mouvements constitutionnels et parlementaristes chez les Mongols, les Tibétains et les Musulmans ne conduisent à la séparation de ces régions si l'Empire Qing ne menait pas de réformes similaires. Ils espéraient donc que la représentation parlementaire puisse servir d'outil contre les tendances centrifuges aux frontières.Toutefois, ils refusèrent l'application directe du cadre constitutionnel aux territoires frontaliers, invoquant leur faible densité de population ainsi que leur prétendue arriération économique et culturelle. À la place, ils proposèrent de les représenter par des sièges nommés dans la nouvelle chambre haute du parlement. Le Xinjiang constituait un hybride entre une province qui devait, au moins formellement, se conformer aux mêmes standards que les autres provinces, et une région frontalière qui n'était pas considérée comme égale aux provinces intérieures. Parce que le Xinjiang était officiellement une province, il possédait, en théorie, une assemblée provinciale, bien que celle-ci n'ait pas organisé d'élections et qu'aucun délégué élu n'ait été envoyé au Conseil consultatif politique à Pékin. Parallèlement, il était également représenté dans le cadre du « constitutionnalisme frontalier » par deux nobles nommés siégeant dans l'embryon de chambre haute. Ces politiques différenciées cherchaient essentiellement à parlementariser le modèle patrimonial des Qing, qui accordait des privilèges à la noblesse frontalière en échange de sa fidélité. Cependant, ces compromis laissèrent toutes les parties insatisfaites.Les défis posés par la proclamation de la République de Chine, en particulier les déclarations d'indépendance de la Mongolie et du Tibet, conduisirent à une insistance accrue sur l'unité du nouvel État et à l'adoption rapide du modèle de l'État-nation. Dans la nouvelle « République des Cinq Ethnies » (wuzu gonghe 五族共和), le Tibet et les régions mongoles bénéficièrent d'une représentation à la fois dans la chambre haute et dans la chambre basse. Toutefois, en analysant les écrits des premiers juristes constitutionnels républicains et les débats au sein du Sénat républicain naissant, je montre que ce choix ne fit pas l'unanimité. De plus, diverses modifications et exceptions insérées dans la loi électorale firent en sorte que la participation électorale ne fût pas strictement territoriale, mais releva une fois de plus d'un système différencié de représentation frontalière.
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Conférence - Naoko Shimazu : Symbolic Diplomacy: Tojo and the 1943 Tokyo Conference
Anne ChengCollège de FranceHistoire intellectuelle de la ChineAnnée 2024-2025Conférence - Naoko Shimazu : Symbolic Diplomacy: Tojo and the 1943 Tokyo ConferenceNaoko ShimazuProfessor and Deputy Director, Tokyo CollegeNaoko Shimazu est invitée par l'assemblée du Collège de France sur proposition de la Pr Anne Cheng.RésuméThe Greater East Asia Conference was held on 5 and 6 November 1943 in Tokyo, under the chairmanship of Prime Minister General Tōjō Hideki. Variously known as the Tokyo Conference, the Greater East Asia Congress, or the Assembly of East Asiatic Nations, the conference gathered the five 'independent' states of the Manchukuo, Reorganised National Government of China (the Nanjing Regime), the Philippines, Burma, and Thailand within the Greater East Asia Co-Prosperity Sphere, to show a united front against the Allied powers, and most importantly, to confirm the establishment of the Greater East Asia Co-Prosperity Sphere. It was the only large-scale diplomatic pageantry held in wartime Japan that attempted to make some diplomatic capital out of its short-lived Co-Prosperity Sphere. This lecture offers a novel perspective on this conference by privileging 'performance' as an analytical prism and consider the role of the emotive or the 'affect' in international diplomacy. This presentation which examines the Greater East Asia Conference of 1943 as a symbolic performance, represents two overarching intellectual enquiries I have: first to examine competing notions of 'Asia' at key historical junctures in twentieth-century Asia; second, to develop and apply an interdisciplinary methodological framework that can explain symbolic meanings in politics and diplomacy, in order to illustrate how 'Asia' came to be envisioned and enacted. In the end, we shall discover that Tojo was both the choreographer and the dancer/actor of the show that became emblematic of his notion of Greater East Asia. Indeed, the multiple role-playing of Tojo, and the importance he attached to it, becomes pivotal to our understanding of this particular story.
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Conférence - Naoko Shimazu : Japan at the 1919 Paris Peace Conference
Anne ChengCollège de FranceHistoire intellectuelle de la ChineAnnée 2024-2025Conférence - Naoko Shimazu : Japan at the 1919 Paris Peace ConferenceWar and Peace: A Global History of Japan, 1904-1943Naoko ShimazuProfessor and Deputy Director, Tokyo CollegeNaoko Shimazu est invitée par l'assemblée du Collège de France sur proposition de la Pr Anne Cheng.RésuméIt is not well known that Japan fought as one of the Allied powers in the First World War, as Japan was a naval alliance partner of Britain from 1902. At the Paris Peace Conference of 1919, Japan attended it as the fifth largest great power in the world, after the United States, Britain, France and Italy, represented by high profile statesmen – Woodrow Wilson, David Lloyd-George, Georges Clemenceau and Vittorio Orlando. This lecture situates Japan in the world in 1919, and what the peace conference had meant for Japanese politics and foreign policy in the 1920s and beyond. What is most striking about the Japanese participation at Paris was that it proposed a racial equality proposal to be inserted into the League of Nations Covenant which was drafted in the League of Nations Committee headed by the American president Woodrow Wilson. Why did the Japanese delegation propose a principle of international justice? The lecture will offer explanations as to why the Japanese wanted to submit this proposal, and the long and difficult negotiation it had to endure in the process. What the Japanese had not realized was that this proposal had been misconstrued by the British Empire delegation, especially the Australian premier Billy Hughes who insisted on blocking it by arguing that it amounted to free immigration of all peoples into Australia and other settler territories.
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09 - « Il ne peut y avoir deux soleils dans le ciel, ni deux princes pour un pays » : Le culte du Grand Un
Anne ChengCollège de FranceHistoire intellectuelle de la ChineAnnée 2024-202509 - « Il ne peut y avoir deux soleils dans le ciel, ni deux princes pour un pays » : Le culte du Grand UnIntervenant :Anne ChengProfesseur du Collège de France
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Séminaire - Stéphane Feuillas : Lectures du Baopuzi de Ge Hong (suite) (8)
Anne ChengCollège de FranceHistoire intellectuelle de la ChineAnnée 2024-2025Stéphane FeuillasIntervenant :Stéphane FeuillasProfesseur en études chinoises classiques, université Paris Cité
Sobre Histoire intellectuelle de la Chine - Anne Cheng
La chaire Histoire intellectuelle de la Chine a été créée en 2008 sur la proposition de Pierre-Étienne Will, titulaire de la chaire Histoire de la Chine moderne de 1991 à 2014, et en écho à la chaire Histoire sociale et intellectuelle de la Chine occupée par Jacques Gernet de 1975 à 1992. Sa mission principale est d'animer la discipline qu'il est convenu d'appeler « sinologie » et que l'on peut considérer comme une invention française, la toute première chaire consacrée aux études chinoises en Europe ayant été créée au Collège de France dès 1814.Jusqu'au milieu du siècle dernier, cette discipline s'est constituée sur le modèle des études classicistes antiquisantes (gréco-latines en particulier), avec la mise en œuvre d'une approche avant tout philologique. Depuis l'après Seconde Guerre mondiale et les années 1960-70, le champ des connaissances et des compétences concernant le monde chinois s'est élargi aux sciences humaines et sociales, et il n'est désormais plus possible de se limiter à une méthodologie qui ne prendrait en compte que les sources textuelles.La question de la continuité ou de la discontinuité entre une Chine dite « traditionnelle » ou « classique », et une Chine « moderne » et « contemporaine » se pose partout et à tout instant. Il est donc devenu indispensable d'envisager les matériaux anciens, non seulement à travers une lecture savante et exégétique, mais aussi à travers leurs appropriations et réinterprétations multiples dans la Chine et le monde d'aujourd'hui. C'est ce à quoi s'emploie la chaire, dans tous les aspects de ses diverses activités qui vont de l'édition bilingue de textes en chinois classique jusqu'à l'édition numérique de travaux de recherche, de conférences invitées et d'actes de colloques internationaux, en passant par des publications de livres concernant divers aspects de l'histoire intellectuelle chinoise dans toute sa longue durée.Née en 1955 à Paris de parents chinois, Anne Cheng a suivi un parcours complet à l'école de la République, nourri d'humanités classiques et européennes, jusqu'à l'École normale supérieure, avant de choisir de se consacrer entièrement aux études chinoises. Depuis plus de quarante ans, elle a mené ses travaux d'enseignement et de recherche sur l'histoire intellectuelle de la Chine, en particulier sur le confucianisme, d'abord dans le cadre du CNRS (Centre national de la recherche scientifique), puis de l'Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales), avant d'être nommée à l'Institut universitaire de France et, peu de temps après, élue au Collège de France.Elle est l'auteure notamment d'une traduction en français des Entretiens de Confucius, d'une étude sur le confucianisme du début de l'ère impériale et d'une Histoire de la pensée chinoise traduite en de nombreuses langues européennes et orientales. Elle a également dirigé plusieurs ouvrages collectifs, parmi lesquels La pensée en Chine aujourd'hui (Gallimard, 2007), Lectures et usages de la Grande Étude : Chine, Corée, Japon (Collège de France, 2015), India-China : Intersecting Universalities (OpenEdition Books, 2020), Historians of Asia on Political Violence (OpenEdition Books, 2021), Penser en Chine (Gallimard, 2021), Autour du Traité des rites (Hémisphères, 2022).Depuis 2010, elle codirige la collection des « Budé chinois » aux Belles Lettres.